4 décembre 2022
IIe Dimanche de l’Avent, année A
Mt 3,1-12
Comme chaque année, au deuxième dimanche de l’Avent, la liturgie nous présente la figure de Jean-Baptiste, première des deux grandes figures qui nous accompagnent sur le chemin de l’Avent.
Pour nous aider à le reconnaître, Matthieu commence d’abord par nous donner des informations sur la façon dont il est vêtu : Jean portait un vêtement de poils de chameau, avec une ceinture de cuir autour de la taille (Mt 3,4). Il ne s’agit pas d’un simple détail, ou d’une particularité sans importance, mais bien d’une référence évidente à la tenue du prophète Elie, qui justement, est décrit au début de sa mission, comme « un homme portant un vêtement de poils ; une ceinture de cuir autour des reins » (2 Rois 1,8).
Avec ce vêtement, l’évangéliste semble vouloir dire ici : voici qu’Élie est de retour, le signe attendu depuis des siècles, le signe qui indique sans équivoque que le Messie est en train de venir. En effet, dans la prophétie de Malachie (Mal 3,23), il est dit que le Seigneur enverrait le prophète Elie : « Voici que je vais vous envoyer Élie le prophète, avant que vienne le jour du Seigneur, jour grand et redoutable ».
Plus tard (Mt 11,10 ; 17,10 à 13), Jésus Lui-même confirme par deux fois cette identification entre Elie et Jean.
L’apparition de Jean dans le désert signifie donc que toute l’attente messianique du peuple d’Israël trouvera son accomplissement, et que quelque chose de grand va arriver.
De telles nouvelles suscitent mouvement, attente et espérance : les gens se rendent au désert, lieu de conversion et d’écoute, pour voir ce nouvel Elie envoyé du ciel.
Et dans le désert Jean « prêche » (3,1) justement cela, que le royaume des cieux est tout proche.
Il confirme la bonne nouvelle, celle que tout le monde attend, la nouvelle d’un Dieu qui se fait proche, qui tient ses promesses, qui va visiter son peuple. « Celui qui vient après moi … » dit Jean (3,11).
S’il est vrai que le royaume est tout proche, alors il nous faut nous préparer à l’accueillir, ce qui est exactement la tâche de Jean-Baptiste : l’évangéliste Matthieu prend soin d’introduire ici la prophétie d’Isaïe (Is 40,3), dans laquelle une voix mystérieuse et anonyme demande au peuple de préparer le chemin du Seigneur qui revient.
Eh bien, cette voix se fait à nouveau entendre, et c’est la voix de Jean-Baptiste. Tout va dans le sens d’un accomplissement qui commence à se réaliser.
Il est temps de se préparer. Mais comment ?
Le Baptiste donne à ce sujet des indications fondamentales et très simples.
D’abord, il met en garde contre un grand danger : celui de penser que l’on est déjà prêt.
C’est le danger des pharisiens et des sadducéens (Mt 3,7 sq.), qui apparaissent ici pour la première fois dans l’Evangile. Jean interprète leur pensée, montrant qu’elle est fondée sur l’idée que l’appartenance à un peuple, à une tradition, suffit pour se sentir sauvé, pour être en règle, « N’allez pas dire en vous-mêmes : Nous avons Abraham pour père » (Mt 3,9). Il est inutile d’en appeler à tout cela.
Ainsi, le véritable obstacle pour atteindre le Seigneur, paradoxalement, n’est pas le péché, mais la présomption d’être justes.
Jean, en outre, ne demande pas de faire quelque chose de spécial, comme jeûner, pratiquer l’ascèse ou observer des rites. Il est nécessaire, avant toute chose, de se convertir.
Le mot conversion est un mot-clé de l’Evangile d’aujourd’hui : il est répété par trois fois.
Que signifie se convertir ? C’est ce que font les personnes qui accourent auprès de Jean : « Ils se faisaient baptiser par lui dans le Jourdain, confessant leurs péchés » (Mt 3,6). Se convertir signifie entrer dans cette humble attitude de celui qui reconnaît sa propre indignité, le mal qui l’habite, son besoin de salut, une attitude qui s’ouvre à la miséricorde du Seigneur.
Tout cela, pour l’évangéliste Matthieu, est la seule façon de préparer le chemin du Seigneur.
Cela semble si simple, et pourtant nous savons que ce n’est pas le cas…
Le Messie enfin attendu par Jean le Baptiste est d’abord un juge et nous le comprenons à partir des images qu’il utilise pour le décrire : la cognée qui se trouve à la racine des arbres qui ne portent pas de fruits (v.10) ; la pelle à vanner pour battre le blé, puis brûler la paille (v.12). Ces expressions désignent un juge sans miséricorde, mais qui apporte une solution au problème du mal et du péché comme tous l’attendait, et comme l’homme pouvait se l’imaginer par lui-même : éliminer le péché et le pécheur. Ce sont des mots qui ont une certaine charge de violence …
Les choses n’arriveront pas exactement comme il le prévoyait et le premier à s’étonner de ce Messie vraiment nouveau et différent sera le Baptiste lui-même. C’est lui, qui dans l’Évangile d’aujourd’hui est si sûr de lui et si clair, et qui de sa cellule de prison, perplexe par ce qu’il entend sur Jésus, qui fait et dit des choses imprévues et différentes, va envoyer lui dire par ses disciples : « Es-tu celui qui doit venir, ou devons-nous en attendre un autre ? » (Mt 11,3). Es-tu vraiment celui dont j’ai annoncé la venue dans le Jourdain, quand j’ai appelé le peuple à la conversion ?
Dans sa réponse, Jésus le renvoie aux prophéties d’Isaïe, que nous lirons en ces jours de l’Avent: « Les aveugles retrouvent la vue, et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. (Mt 11,5). Oui – dit Jésus, c’est moi, et je fais ce qui a été écrit. C’est-à-dire qu’il l’invite à revenir au vrai sens de sa venue, qui est celui annoncé par le prophète Isaïe. En d’autres termes, Jésus l’invite à se libérer de ses petites attentes personnelles pour laisser la place à Sa parole de salut.
Et là sera la conversion personnelle du Baptiste. Et, peut-être qu’elle pourrait aussi être un peu la nôtre.
+ Pierbattista