22 janvier 2023
III Dimanche du temps ordinaire, année A
Mt 4,12-23
Pour entrer dans le texte d’Evangile que la liturgie d’aujourd’hui nous propose, commençons par un verset de la première lecture. L’Évangile, en effet, commence par une citation du livre d’Isaïe, qui est citée dans sa totalité dans la première lecture : « Car le joug qui pesait sur lui, la barre qui meurtrissait son épaule, le bâton du tyran, tu les as brisés comme au jour de Madiane. » (Is 9,3).
Il s’agit d’un oracle écrit pour un moment extrêmement dur et dramatique de l’histoire biblique, lorsque le royaume du nord subit la cruelle domination assyrienne. Le passage d’Isaïe, à son tour, fait référence à un autre moment difficile de l’histoire biblique, rapporté au chapitre 6 du Livre des Juges, au temps de Madiane, oppresseur des tribus d’Israël à cette époque.
L’évangéliste se réfère à ces périodes bibliques particulières de l’Ancien Testament où le peuple subit l’oppression, pour souligner que le temps où Jésus commence son œuvre de salut est aussi un temps d’oppression, comme cela s’est déjà produit plusieurs fois au cours des siècles : rien de nouveau. L’histoire de l’homme semble incapable de générer autre chose que cela, l’infidélité et la violence, de génération en génération.
L’allusion à Madiane peut nous être utile pour comprendre comment Jésus entre dans cette période difficile. Le chapitre 6 du Livre des Juges raconte en effet l’histoire de Gédéon, appelé par Dieu à sauver son peuple malgré le fait qu’il soit le plus petit dans la maison de son père, et malgré le fait que sa famille soit la plus pauvre de Manassé (« Gédéon reprit : ‘ Pardon, mon Seigneur ! Comment sauverais-je Israël ? Mon clan est le plus faible dans la tribu de Manassé, et moi je suis le plus petit dans la maison de mon père !’ » Juges 6,15). L’histoire se poursuit avec le récit de l’affrontement entre les Israélites et Madian (Juges 7), dans lequel il est clair que c’est Dieu qui sauve et donne la victoire, et non les Israélites avec leur propre force.
Eh bien, dans le passage de l’Évangile d’aujourd’hui, nous pouvons retrouver la même dynamique. Tout d’abord, Jésus commence son ministère par une invitation qui doit être comprise précisément à la lumière de ce qui a été dit : « convertissez-vous ». (Mt 4,17).
Ce qui sauve de l’oppression et de la violence, c’est la possibilité pour l’homme de se convertir, de changer sa mentalité. Et la mentalité peut évoluer comme pour Gédéon, appelé à se convertir en se détournant de l’idée que Dieu sauve par la force. Alors que ce n’est pas le cas.
Dieu sauve à travers la petitesse, en se faisant de plus en plus proche, en prenant sur lui les limites, en se mettant dans une attitude d’obéissance et de douceur. Non pas par la force, non pas en répondant à la violence par la violence, mais en choisissant d’autres voies. C’est pour cela que Jésus peut dire que le Royaume de Dieu est proche (Mt 4,17).
De plus, comme au temps de Madiane, Dieu sauve en choisissant un homme, et en le choisissant parmi les pauvres, ainsi commence ce temps de salut que Jésus est venu inaugurer.
En passant sur les rives du lac de Galilée, en effet, Jésus voit deux paires de frères occupés à leur travail et les appelle à le suivre (Mt 4, 18-22).
Le salut s’accomplit ainsi, en se mettant à la suite, c’est-à-dire à travers cette expérience où l’on cesse d’être le centre et le barycentre de sa vie, et où l’on laisse un Autre guider son existence.
C’est une question d’amour et de confiance.
Et il se trouve que le petit groupe de pauvres qui acceptent cette nouvelle aventure forme une première ébauche d’une communauté différente, d’une fraternité nouvelle, dans laquelle on est ensemble non pas parce qu’on se choisit les uns les autres en vertu d’une quelconque affinité, mais parce que tout a été choisi par le Seigneur qui est passé dans la vie de chacun.
Une dernière remarque : l’invitation faite par Jésus de Le suivre est suivie d’une promesse.
Non pas la promesse d’une récompense, non pas la promesse d’une vie sans problèmes.
« Je vous ferai pêcheurs d’hommes. » (Mt 4,19).
La promesse sous-jacente à chaque appel est que la vie de l’appelé s’accomplira dans la mission. Une vie qui ne s’épuise pas dans les horizons étroits de sa propre histoire, mais qui prend des dimensions universelles, se marie à l’histoire des hommes de son temps.
C’est la promesse à laquelle Dieu reste fidèle.
+ Pierbattista