18 septembre 2022
XXV Dimanche du Temps Ordinaire, année C
Lc 16,1-13
Le passage d’aujourd’hui (Lc 16,1-13) suit directement le chapitre XV de l’Évangile de Luc, avec les paraboles de miséricorde que nous avons entendues dimanche dernier, et continue avec un style parabolique.
Celle qui nous est rapportée aujourd’hui est cependant assez étrange : Jésus parle d’un administrateur qui s’acquitte de ses fonctions de manière malhonnête ; son employeur le remarque, et une grande partie de la parabole est occupée par les stratagèmes que l’administrateur imagine pour se sauver de cette malencontreuse situation. Et, à la fin, le maître le loue pour sa fourberie.
Apparemment, si on la compare avec les paraboles que nous avons entendues dimanche dernier, il semble aujourd’hui que Jésus a complètement changé de sujet. Mais ce n’est peut-être pas le cas.
Il y a plusieurs éléments communs que nous allons essayer d’écouter.
Le premier est celui de la difficulté : dimanche dernier il y avait un fils en difficulté après avoir quitté la maison, aujourd’hui il y a un administrateur qui est découvert dans ses intrigues.
Ensuite, les deux se trouvent dans cette difficulté parce qu’ils l’ont cherchée d’une manière ou d’une autre.
Dans les deux cas, la difficulté est insoluble avec les seules forces humaines, et la chose est très bien rendue par les paroles de l’administrateur : « Que vais-je faire,
puisque mon maître me retire la gestion ? Travailler la terre ? Je n’en ai pas la force.
Mendier ? J’aurais honte » (Lc 16, 3).
Tous deux rentrent en eux-mêmes, une fois qu’ils ont atteint le fond, pour décider ce qu’il faut faire.
Enfin, tous deux ne veulent rien de plus qu’une maison, un endroit où ils peuvent être accueillis à nouveau après avoir fait l’expérience de leur propre limite, leur propre erreur, leur propre incapacité à être suffisants pour eux-mêmes.
C’est pourquoi, de la parabole d’aujourd’hui, comme de celle de dimanche dernier, nous pouvons percevoir un même message.
Le premier est que nous sommes tous des personnes qui portons en nous un manque : nous avons une dette, avec laquelle nous sommes nés, du simple fait d’avoir reçu la vie comme un don, et cette dette augmente de plus en plus sur le chemin de la vie.
Aucun d’entre nous, d’aucune façon, ne peut la rembourser : c’est impossible.
Il ressort aussi de cette parabole que tout cela n’est pas un grand problème : le maître ne se précipite pas contre l’administrateur, il ne s’attend pas à ce qu’il rembourse immédiatement la dette. Au contraire, cela lui donne le temps de régler les choses d’une façon ou d’une autre.
Ce qui est important, en fait, c’est de trouver un moyen de ne pas être coincé dans sa propre dette, dans sa propre peur : et nous pourrions dire que le moyen, mais c’est le seul, c’est de percevoir ce qui est la vraie richesse, le vrai bien.
L’administrateur se rend compte que la vraie richesse est celle de l’amitié, de la fraternité, et il fait tout son possible pour en prendre possession.
Il le fait en cessant d’utiliser les autres pour s’enrichir, et en commençant, au contraire, à utiliser la richesse pour trouver l’amitié. On pourrait dire qu’il cesse de trouver une maison dans la richesse et commence à trouver une maison chez ses frères, tout comme le jeune fils dans la parabole de dimanche dernier, qui cesse de chercher une maison en lui-même et dans ses propres caprices et trouve ainsi la maison de son père.
Jésus, ayant terminé le récit de la parabole, ajoute une exhortation très sévère sur la richesse (Lc 16, 9-13), parce qu’il sait que le désir des biens est cette chose qui peut obscurcir la vue de l’homme, et lui faire croire qu’ils suffisent à sa vie, sa joie.
Et il en est ainsi depuis le début de l’histoire : l’instinct du péché, que Dieu voit croupir dans le cœur de Caïn (Gn 4, 7), n’est rien de plus que cette insatiable cupidité. Pour l’apaiser, l’homme est prêt à tout faire.
En réalité, Jésus affirme que les richesses sont petites, même quand elles sont nombreuses, et qu’elles sont malhonnêtes (Lc 16,11-12) : elles sont petites parce qu’elles ne suffisent pas à donner la vie ; et elles sont malhonnêtes parce qu’elles promettent la vie même si elles ne sont pas capables de tenir la promesse.
Pourtant, celui qui est fidèle à cette chose petite et malhonnête, sans l’utiliser en pensant qu’elle est tout, mais en vivant comme des personnes qui ont des manques mais qui partagent ce qu’elles ont avec les autres, trouvera finalement, dans ce même partage, la vraie richesse.
Une richesse capable d’apaiser le désir et de trouver une maison où il est enfin possible de vivre.
+Pierbattista